Ode à toi, enseignante du préscolaire
*Le féminin est utilisé afin d’alléger le texte et parce qu’on va se le dire, c’est une profession qui regroupe majoritairement des femmes. Mais je vous aime messieurs enseignants et vous n’êtes pas assez nombreux parmi nous.
Ode à toi, enseignante du préscolaire. Il n’y a pas grand monde qui voudrait faire ta job. Et dans pas grand monde, ça inclut aussi pas mal de tes collègues des autres niveaux.
Tu sais, la prof au CÉGEP et à l’université doit dealer avec des portables perdus dans le métro la veille de la remise de travail de fin de session, des étudiants qui partent souvent à la pause en se foutant éperdument de leur avenir et des étudiants qui ont fait un mauvais choix de cours et qui coulent leur stage parce que, visiblement, ils ne sont pas dans la bonne branche d’études.
L’enseignante au secondaire, elle, doit dealer avec des ados qui ont les hormones dans l’tapis, en peine d’amour parce que Stacey a volé le chum de l’autre par messenger pendant un party d’enfants de 14 ans, un mardi soir, la veille d’un examen et que c’est dont bin plaaaate les maths pis ça sert à rien de savoir le théorème de Pythagore dans la vie.
L’enseignante du primaire doit dealer avec des chicanes de soccer à la récré parce qu’il a kické le ballon dans le but après la cloche pis ça compte paaaaas. Elles doivent garder le sourire devant des parents-trop-lousses-qui-s’en-foutent ou des parents-super-méga-protecteurs-mon-enfant-est-un-ange et elle doit enseigner et évaluer toujours plus et toujours mieux en parlant de pratiques probantes, de facteurs de réussite, de taux de vulnérabilité… pendant que les élèves de la classe d’à côté sont rendus à 8 remplaçants différents en un mois. Bref, ça c’est une autre histoire.
Mais toi, enseignante du préscolaire, tu dois dealer avec quelque chose d’encore plus extrême… des enfants de 4-5-6 ans (oui, oui j’inclus tout le monde, moi! Maternelle 4 ans ou 5 ans, peu importe!). Toi, chère enseignante-maman-au-grand-cœur, tu ne t’offusques pas quand un enfant entre dans ta bulle, ton p’tit cocon, pour te tirer le chandail aux 3 secondes et quart, en criant Madaaaame! Madaaaame! Madaaaame! exactement 23 fois en un peu plus d’une minute, avec ses mains gluantes de morve. Non, tu ne t’offusques pas, tu ne t’énerves pas et tu te retournes en lui disant Qu’est-ce qu’il y a mon cœur? Tu n’as pas à répéter Madame 40 fois pour… Cependant, tu ne peux pas finir ta phrase parce que, ce que tu vois, c’est une p’tite paire de fesses d’enfant-qui-est-penché-par-en-avant et qui dit Essuie-moi, j’ai fait caca et je ne suis pas capable! Toi, enseignante du préscolaire, tu dis calmement à cet enfant-qui-n’est-pas-le-tien-et-qui-te-donne-soudainement-trop-d’informations-sur-lui qu’il est capable de le faire et, qu’au pire, si ça pique, ça voudra dire qu’il faudra retourner aux toilettes pour mieux essuyer cette région. Fait vécu.
C’est à ce moment même, lors de mon stage au préscolaire, que j’ai décidé que ce n’était pas pour moi. Le primaire me suffira amplement! Une chance qu’il y a des merveilleuses-enseignantes-réconfortantes pour ces cocos débutant leur carrière scolaire. Sans toi, il y a plein de profs et d’enseignantes de l’université, du CÉGEP, du secondaire ou du primaire qui devraient faire ta job et je crois qu’on ne survivrait pas plus d’une semaine. J’ai l’habitude de traiter les enseignantes du préscolaire de complètement folles. Ne m’en veut pas, c'est un compliment! Ma sœur est au présco, alors je me donne le droit de juger sa santé mentale d’avoir choisi ce niveau!
Bref, à toutes ces enseignantes du préscolaire qui ont déjà dit ne liche pas la colle en bâton, bin non il n’y a pas de fantômes dans l’école, tu ne peux pas obliger Mathis à être ton ami, enlève tes doigts de ton nez et mange PAS tes crottes de nez… À toutes ces enseignantes du préscolaire qui lisent des histoires captivantes à leurs élèves avec des voix élaborées à la manière de Robin Williams dans Madame Doubtfire (oui, je suis vieille, les élèves ne connaissent pas ce magnifique film de mon enfance, mais vous autres, oui)… À toutes ces enseignantes du présco qui chantent des chansons pour ranger, pour s’habiller, pour apprendre les sons, bref qui chantent trop souvent pour moi qui suis incapable de le faire sauf dans ma douche, en char ou quand j’ai un verre dans l’nez… À toutes ces enseignantes si sécurisantes qui préparent ces petits bouts d’humains à commencer leur parcours scolaire en leur apprenant carrément c’est quoi vivre avec les autres… Bref, à toutes ces enseignantes du préscolaire qui ont déjà dit si ça pique, retourne aux toilettes pour mieux t’essuyer, je t’applaudis, je te suis reconnaissante de faire cette job-là et je te souhaite bonnes vacances.
C’est comme un peu beaucoup mérité!
Paix, sangria, soleil et plaisirs,
Amélie