Ode à toi, enseignante au primaire

*Le féminin est utilisé afin d’alléger le texte et parce qu’on va se le dire, c’est une profession qui regroupe majoritairement des femmes. Mais je vous aime messieurs enseignants et vous n’êtes pas assez nombreux parmi nous.

Ode à toi, enseignante au primaire. Ce qui est fascinant avec ta job, c’est que tu peux autant apprendre à un enfant à écrire sa première phrase qui a du sens que lui expliquer que ça n’existe pas un sac à sperme et que le vrai nom à utiliser est condom. Fait vécu. Bienvenue dans le monde du primaire où petite-enfance-bébé-làlà et pré-adolescence-pas-l’fun se côtoient tous les jours.

Toi, enseignante-merveilleuse-remplie-d’idées, tu fais vivre aux élèves des projets emballants, tu leur apprends à devenir des petits bouts d’humains aimants, critiques, empathiques et ouverts sur le monde. Tu es aux premières loges quand les yeux d’un enfant en difficulté s’ouvrent et s’illuminent parce qu’il a compris une notion que tu lui enseignes pour la 8e fois. Tu es si importante dans la vie de ces enfants. Tu es leur modèle, tu es ce à quoi ils peuvent s’identifier, tu es leur confidente, tu es leur pilier, tu es sécurisante, tu es sérieuse aussi parfois… parce que sinon, bonne chance la gestion de classe! Tu portes tellement de chapeaux différents et tu fais ça avec brio!

Tu peux parler des Algonquiens, du judaïsme, du groupe du nom, de fractions pas comprenables, de Kandinsky, des inégalités dans le monde et des règles au soccer à la récré… DANS. LA. MÊME. JOURNÉE. Toi, enseignante au primaire, tu as une multitude de matières à couvrir et des petits humains prêts à apprendre, à devenir meilleurs de jour en jour. OK, OK… Pas toujours prêts, mais j’aime vivre dans mon monde de licornes! Il se peut qu’un but APRÈS la cloche vienne bousculer ton p’tit côté zennn quand Charles va revenir de la récré en criant et en pleurant comme s’il avait vu la troisième guerre mondiale starter dans la cour d’école quelques secondes auparavant. Mais, toi, enseignante au primaire, tu sais gérer ça des enfants ayant des réactions spontanées, exagérées, comme si la Terre arrêtait de tourner. Même si tu en as 20-25 autres dans ta classe qui attendent bien sagement que tu finisses ton intervention avec Charles. Ouin, bien sagement... Je te l'ai dit, j'aime vivre dans mon monde de licornes! Tu fais ta patiente avec des yeux doux ou des faux-yeux-fâchés et tu expliques bien à Charles que ce n’est pas la bonne façon de réagir à un osti de but après la cloche. OK, OK… Tu n’utiliseras pas le mot osti. C’est pas beau… Du moins, pas devant les élèves. Et tu vas laisser Charles déverser toutes les larmes de son corps dans le coin lecture en allant le voir au bout de 10 minutes pour savoir s’il s’est calmé et s’il est prêt à faire un message clair. Bin oui toé! Un cristi de message clair… Combien de fois dans la journée tu dis ces mots-là? Tu compteras et tu auras le droit de prendre autant de shooters dans tes vacances que le nombre de fois que tu as dis fais un message clair. Tu vas voir, il n’y a pas assez de journées d’été pour réussir à boire tous ces shooters.

Si tu n’étais pas là, enseignante au primaire, qui serait là auprès de l’élève blessé et qui le réconforterait en lui disant va mouiller un p’tit papier brun, ça va bien aller? Et ça va fonctionner! Oui, oui, pas besoin d'ambulance! Qui serait là pour leur expliquer que regarder en dessous de la porte des toilettes, ce n’est pas approprié, OK?!? Sans péter une trop grosse coche parce qu’en 4e année, tu devrais savoir ça, mon grand! Qui serait là pour expliquer à Liam que lancer une garnotte dans la face de Chloé, ce n’est pas une bonne façon de lui dire qu’il a un kick sur elle? Qui serait là pour Léa qui vient de perdre son grand-papa? Et qui va chercher quel album pourrait être lu afin de la réconforter. Sur Facebook. Dans un groupe d’enseignants. À 22h. Un samedi soir. Qui serait là pour se faire dire au moins une fois par année Madame! Tu as un bébé dans ton ventre! et que ce n’est pas le cas? Et qui garderait le sourire en disant Non, je ne suis pas enceinte, je suis juste grosse! en attendant de voir la réaction de l’enfant. Désolée… J’aime ça les martyriser un peu, mais c’est de l’amour! Qui serait là pour expliquer aux élèves du 3e cycle que du déo, ça existe et que du Axe, ça pu en maudit quand tu en mets trop? Petit cours 101 sur la propreté et le vivre en société donné su’l fly après un cours d’éduc en juin. Qui serait là pour se faire dire OMG madame! Tu es fatiguée, hein, aujourd’hui?! en t’expliquant avec beaucoup trop de détails comment le dessous de tes yeux est noir, noir, noir? Et se dire bin oui, toi, c’est vrai que je suis fatiguée… La vérité sort de la bouche des enfants, hein?! Qui serait là pour faire les surveillances? À -35°C. Le matin. Aux autobus. Avant ton premier café. Tu es simplement indispensable toi, enseignante au primaire. Est-ce qu’on te l’a déjà dit? Bin en tout cas, moi je te le dis maintenant. TU. ES. INDISPENSABLE.

Alors, quand tu seras rendu à boire tes 10 000 shooters pour les 10 000 messages clairs demandés à tes élèves durant l’année, bin tu lèveras ton verre pour toutes ces enseignantes-qui-changent-le-monde-un-enfant-à-la-fois et je ferai de même. Chin! Chin! À ta santé et bonnes vacances, enseignante au primaire, parce qu’on le mérite bien!

Paix, sangria, soleil et plaisirs,

 Amélie